Dépôt de bilan pendant arrêt maladie : vos droits et recours

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Un salarié en arrêt maladie conserve ses droits lorsque son entreprise dépose le bilan, grâce aux protections légales en vigueur. Nous recevons régulièrement des questions d’inquiétude de la part de salariés confrontés à cette situation délicate : licenciement possible, indemnités à récupérer, démarches à effectuer… Rassurez-vous, vos droits restent protégés même dans ce contexte difficile.

Cette situation concerne plusieurs aspects essentiels :

  • Le maintien de vos indemnités journalières par la Sécurité sociale
  • La protection contre un licenciement abusif lié à votre état de santé
  • La garantie de vos créances salariales par l’AGS (Assurance Garantie des Salaires)
  • Les procédures spécifiques selon le type de procédure collective engagée

Nous allons vous expliquer précisément comment naviguer dans cette période complexe et vous assurer que tous vos droits sont préservés.

Que se passe-t-il pour un salarié en arrêt maladie en cas de dépôt de bilan ?

Lorsqu’une entreprise dépose le bilan pendant que vous êtes en arrêt maladie, votre situation juridique reste protégée par plusieurs mécanismes. Votre contrat de travail, bien que suspendu par l’arrêt maladie, n’est pas automatiquement rompu par la procédure collective.

La cessation de paiements de l’entreprise n’interrompt pas vos indemnités journalières versées par la CPAM. Ces dernières continuent d’être versées normalement, car elles dépendent de votre affiliation à la Sécurité sociale, non de la solvabilité de votre employeur. Le montant reste calculé sur la base de vos derniers salaires, généralement à hauteur de 50% de votre salaire journalier de base après un délai de carence de trois jours.

Votre employeur ne peut plus vous verser votre salaire habituel, sauf si une convention collective spécifique prévoit un maintien de rémunération en cas de maladie. Dans la majorité des cas, cette obligation de maintien de salaire est suspendue dès l’ouverture de la procédure collective.

La communication avec votre employeur reste possible et nécessaire. L’administrateur judiciaire ou le liquidateur peut vous contacter pour vous informer de l’évolution de la procédure, mais ne peut exiger votre présence physique si votre état de santé ne le permet pas. Vous devez néanmoins rester joignable et répondre aux demandes d’informations administratives.

Quelle différence entre redressement judiciaire et liquidation pour le salarié ?

La nature de la procédure collective détermine directement l’évolution de votre situation professionnelle. Ces deux procédures n’ont pas les mêmes conséquences sur votre avenir dans l’entreprise.

En cas de redressement judiciaire, l’entreprise tente de poursuivre son activité sous contrôle judiciaire. Vous restez officiellement dans l’effectif, même en arrêt maladie. L’administrateur judiciaire peut décider de maintenir votre poste si l’activité se redresse. Néanmoins, des licenciements économiques restent possibles si le plan de redressement l’exige et si le juge-commissaire les valide. Dans ce cas, vous bénéficiez de la procédure normale de licenciement économique avec ses garanties : consultation du comité social et économique, recherche de reclassement, respect des critères d’ordre des licenciements.

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En cas de liquidation judiciaire, l’entreprise cesse définitivement son activité. Tous les contrats de travail sont rompus, y compris ceux des salariés en arrêt maladie. Cette rupture intervient pour motif économique, vous ouvrant droit au chômage dès votre rétablissement. Le liquidateur procède à la vente des actifs de l’entreprise pour désintéresser les créanciers selon un ordre de priorité légal.

La durée de ces procédures varie considérablement : un redressement judiciaire peut s’étaler sur 10 ans maximum avec possibilité de prolongation, tandis qu’une liquidation judiciaire dure généralement entre 6 mois et 2 ans selon la complexité du dossier.

Le salarié en arrêt peut-il être licencié pendant la procédure ?

Votre protection contre le licenciement pendant un arrêt maladie reste en vigueur même durant une procédure collective. L’administrateur ou le liquidateur ne peut vous licencier uniquement en raison de votre arrêt maladie – ce serait un licenciement discriminatoire sanctionné par la loi.

Seuls certains motifs de licenciement restent valables pendant cette période. Le licenciement pour motif économique devient possible si la procédure l’exige, mais il doit respecter la procédure légale : consultation des représentants du personnel, recherche de solutions de reclassement, application des critères d’ordre des licenciements définis par la loi ou la convention collective (ancienneté, charges de famille, qualités professionnelles, situation sociale).

Un licenciement pour faute grave reste théoriquement possible, mais il faut que la faute soit caractérisée et qu’elle ne soit pas liée à votre état de santé. L’administrateur devrait pouvoir prouver des éléments factuels précis, ce qui reste rare pour un salarié en arrêt maladie.

La procédure de licenciement doit respecter les formes légales : convocation à un entretien préalable (que vous pouvez refuser si votre état de santé ne le permet pas), notification écrite avec motifs précis, respect du préavis théorique. Si vous estimez votre licenciement abusif, vous disposez d’un délai de 12 mois après la notification pour saisir le Conseil de prud’hommes.

Quels sont les droits du salarié à l’indemnisation ?

Vos droits à indemnisation restent intégralement préservés, même si les modalités de paiement changent en raison de l’insolvabilité de l’entreprise. Le calcul de vos indemnités s’effectue sur la base de votre rémunération antérieure à l’arrêt maladie.

L’indemnité de licenciement économique vous est due si votre contrat est rompu. Elle se calcule selon la formule légale : 1/4 de mois de salaire par année d’ancienneté pour les 10 premières années, puis 1/3 de mois au-delà. Votre convention collective peut prévoir des montants plus favorables. Par exemple, avec 8 ans d’ancienneté et un salaire de 3000€, votre indemnité légale serait de 6000€ (8 × 1/4 × 3000€).

L’indemnité compensatrice de préavis vous est versée même si vous ne pouvez pas l’effectuer en raison de votre arrêt maladie. Sa durée dépend de votre ancienneté : 1 mois si vous avez entre 6 mois et 2 ans d’ancienneté, 2 mois au-delà de 2 ans d’ancienneté.

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L’indemnité compensatrice de congés payés correspond aux congés acquis mais non pris au moment de la rupture. Elle se calcule selon la règle du dixième : salaire perçu pendant la période de référence divisé par 10.

Les salaires impayés avant l’ouverture de la procédure entrent dans vos créances salariales. Ils sont garantis par l’AGS dans la limite des plafonds légaux, actuellement fixés à 4 fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale, soit environ 14400€ en 2024.

Type d’indemnitéBase de calculPlafond AGS
Salaires impayésSalaire habituel4 × PMSS
Indemnité de licenciement1/4 ou 1/3 × salaire × ancienneté8 × PMSS
Préavis1 ou 2 mois selon ancienneté3 × PMSS
Congés payésSalaire/103 × PMSS

Quel est le rôle de l’AGS (Assurance Garantie des Salaires) ?

L’AGS constitue votre filet de sécurité financier lorsque votre entreprise ne peut plus honorer ses obligations salariales. Cet organisme paritaire, financé par les cotisations patronales, intervient automatiquement dès l’ouverture d’une procédure collective.

Son rôle principal consiste à garantir le paiement de vos créances salariales dans les limites légales. L’AGS prend en charge les salaires impayés des 60 derniers jours avant l’ouverture de la procédure, les indemnités de licenciement, de préavis et de congés payés, ainsi que certaines primes et gratifications prévues par votre contrat ou la convention collective.

La procédure de déclaration est déterminante pour récupérer vos sommes. Vous devez déclarer vos créances au mandataire judiciaire dans un délai impératif de 2 mois à compter du jugement d’ouverture. Cette déclaration doit être accompagnée de pièces justificatives : contrat de travail, bulletins de salaire, certificats d’arrêt maladie, attestation d’indemnités journalières.

Le traitement de votre dossier par l’AGS prend généralement entre 2 et 6 semaines après validation par le mandataire. L’AGS vérifie la conformité de vos créances avec la réglementation et procède au calcul selon les plafonds en vigueur. En cas de créances supérieures aux plafonds, la différence reste due par l’entreprise, mais sa récupération dépend du résultat de la liquidation.

Nous recommandons vivement de constituer un dossier complet dès l’annonce de la procédure collective. Gardez tous vos bulletins de salaire, votre contrat de travail, les avenants éventuels, et demandez à votre CPAM une attestation détaillée de vos indemnités journalières. Cette préparation accélère le traitement de votre dossier et évite les retards de paiement.

En cas de difficulté avec l’AGS, plusieurs recours existent. Vous pouvez contacter directement l’organisme pour obtenir des explications sur les calculs effectués. Si un désaccord persiste sur le montant ou l’éligibilité de certaines créances, vous disposez d’un recours devant le Conseil de prud’hommes. Par ailleurs, l’inspection du travail peut vous conseiller et éventuellement intervenir en cas de dysfonctionnement manifeste.

La situation d’un salarié en arrêt maladie lors d’un dépôt de bilan, bien qu’inquiétante, bénéficie de protections légales solides. Vos droits aux indemnités journalières, à une indemnisation en cas de licenciement et à la garantie de vos créances salariales restent préservés. L’essentiel réside dans la rapidité de vos démarches administratives et la constitution d’un dossier complet pour faciliter l’intervention de l’AGS. N’hésitez pas à vous faire accompagner par les représentants du personnel ou un conseiller de France Travail pour optimiser la gestion de cette transition professionnelle.

Écrit par

Julien

Julien est expert en stratégie d’entreprise et co-fondateur de Metracom.fr avec Clara Moreau. Ensemble, ils ont créé ce site pour accompagner les entrepreneurs et freelances dans le développement de leur activité. Grâce à son expertise, Julien garantit des contenus clairs, concrets et utiles, faisant de Metracom.fr une référence en business, finance et formation.

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